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Le 26 novembre 2020 a eu lieu, à distance, une importante conférence sur le fret ferroviaire, à l’initiative de SNCF Réseau et de la Région des Pays de la Loire. Roch BRANCOUR, vice-président du Conseil régional des Pays de la Loire en charge des Transports, de la Mobilité et des Infrastructures, et Christophe HUAU, directeur territorial de SNCF Réseau Bretagne – Pays de la Loire, répondent à nos questions.

Quel était le but de cette conférence ?

Roch BRANCOUR – Rassembler les acteurs du fret ferroviaire dans les Pays de la Loire et lancer une importante étude sur ce mode de transport à la fois ancien et plein d’avenir. Le transport, l’économie et plus généralement l’aménagement du territoire sont des compétences régionales. Or nous sommes dans une période favorable au fret ferroviaire. À nous, collectivement, de saisir l’opportunité : la Région, les pouvoirs publics plus généralement, SNCF Réseau et bien sûr les entreprises, les logisticiens…

 

Quel est l’état des lieux ?

Christophe HUAU – Nous constatons une baisse du trafic de fret ferroviaire depuis vingt ans, ici comme partout en France, avec une stabilisation autour de 9 % depuis 2011. Ce qui veut dire que plus de 90 % du transport intérieur national emprunte la route. Dans les Pays de la Loire, nous estimons le fret ferroviaire en deçà. Et pourtant nous disposons de très importantes infrastructures qui prouvent que l’activité fret fut dans le passé beaucoup plus significative, il suffit de voir les zones de triage dans nos gares.

 

Quelles en sont les causes ?

Roch BRANCOUR – Une dimension systémique de difficultés multicausales : infrastructures, niveau de service offert, capacité des clients… Il faut arriver à bien identifier tous ces enjeux, de façon globale, plutôt que de prendre les problèmes un à un. Jusqu’ici personne ne le faisait : il n’y a pas d’autorité organisatrice du transport de fret ferroviaire !

Christophe HUAU – J’ajouterai quelques autres raisons. D’une manière générale, la France a fortement développé ses activités de service depuis les années 1970 et son secteur productif industriel, client traditionnel du fret, est en revanche moins important qu’il y a quelques décennies. Par ailleurs, les transports routiers ont su proposer des offres à des coûts très compétitifs.  

Quel est le contexte ?

Christophe HUAU – Le contexte est historique. En premier lieu, la volonté de l’État exprimée au plus haut niveau. Le président de la République s’est engagé lors de son allocution du 14 juillet à redévelopper massivement le fret ferroviaire, dans la suite de la loi d’orientation des mobilités [LOM] de 2019, sans oublier le plan de relance national sur le fret, doté d’un budget  d’un milliard d’euros. Ensuite la Commission européenne a prévu dans son « Green Deal 2020 » des fonds et des initiatives pour le fret ferroviaire, avec pour objectif une Europe climatiquement neutre à l’horizon 2050. Il y a, vous le voyez, un alignement des planètes. L’enjeu de la transition écologique, qui n’est contesté par personne, constitue une opportunité majeure pour le fret ferroviaire.

Roch BRANCOUR – Oui, c’est le bon moment ! Tout cela nous permettra de faire les investissements nécessaires pour répondre aux modèles de fret ferroviaire : celui des chargeurs qui ont leurs propres plateformes embranchées sur le réseau ferré, et celui d’autres entreprises à qui nous devons proposer de nouvelles plateformes modales. J’ajoute un autre facteur favorable, auquel nous sommes très attachés à la Région : « l’Alliance 4F » [Fret ferroviaire français du futur] qui regroupe tous les acteurs de la filière, qui réfléchissent avec nous et SNCF Réseau à structurer le fret ferroviaire de demain, avec l’objectif de doubler sa part de marché dans les dix ans à venir. L’étude doit permettre d’unifier encore plus les acteurs sur la performance de ce mode de transport professionnel.

Quelles sont les grandes lignes de cette étude ?

Roch BRANCOUR – Elle doit proposer une stratégie régionale visant un redéploiement pérenne du fret ferroviaire. Ses conclusions sont attendues pour mi-2022. Concrètement, nous allons affiner la connaissance des flux entrants et sortants en fonction des marchés, département par département. Objectif : détecter les bons leviers en faveur d’une relance du fret ferroviaire afin de définir un programme précis. Et, nous l’avons dit, faire émerger un club d’entreprises moteur pour engager le report modal du transport de marchandises – seules les institutions peuvent le faire. Cette étude aura lieu dans le cadre d’une concertation élargi au niveau interrégional : il s’agit de considérer le développement du fret et de la logistique comme un véritable enjeu pour repenser le système productif français, dans le cadre d’une transition écologique volontariste. L’important, je le répète, c’est d’être concret dans une vision globale : identifier le potentiel existant ou à développer, voir à quelles conditions nous pourrons l’activer, avec quel niveau d’engagement.

Vous êtes optimistes…

Christophe HUAU – Absolument. Nous sommes sur un courant porteur, celui de la transition écologique, très favorable au rail compte tenu de tous ses atouts. Les réseaux routiers sont aujourd’hui en voie de saturation et on ne dispose plus d’espaces pour construire de nouvelles autoroutes ! En revanche, nous avons des marges de capacités disponibles avec l’infrastructure ferroviaire existante, y compris pour desservir les grands centres urbains. Et puis, avant tout, nous avons la chance d’avoir une région ligérienne en bonne santé économique et dynamique sur le plan de sa démographie, ce qui constitue un atout indéniable, avec tout un tissu de grandes entreprises et de PME, en Vendée par exemple, et un grand port international à Saint-Nazaire. À nous de mettre en place un service robuste et attractif, favorable pour les clients et les opérateurs du fret ; c’est le but de l’étude qui vient de démarrer.

Elle est pilotée par la Région ?

Roch BRANCOUR – Oui, je préside son comité de pilotage.  Sa pilote opérationnelle se nomme Christelle Biron.