Qu'est-ce qu'une plante invasive ?
"Une espèce exotique envahissante est une espèce allochtone dont l'introduction par l'Homme (volontaire ou fortuite), l'implantation et la propagation menacent les écosystèmes, les habitats ou les espèces indigènes avec des conséquences écologiques, économiques ou sanitaires négatives." (UICN, 2000).
L’expansion des espèces exotiques envahissantes (animaux et végétaux) est reconnue comme la troisième cause de l’érosion de la biodiversité mondiale.
Pour le réseau ferré national, les différents végétaux invasifs s'implantent durablement, en partie, à cause des pratiques de gestion de la végétation sur les abords. Par exemple, les travaux de remise à niveau des ouvrages en terre ouvrent le milieu naturel et laissent l'opportunité à l'espèce envahissante de s'installer, se développer et s'imposer.
Leurs caractéristiques “invasives” se décrivent par une croissance et une multiplication rapide ainsi qu'une domination de l'espace au sein d'un écosystème naturel ou d'un milieu anthropique comme les infrastructures de transport : engagement du gabarit ferroviaire, contact et disjonction avec la caténaire électrique par exemples.
Le projet s'intéresse à cinq espèces invasives particulièrement présentent sur les régions Grand Est et Provence-Alpes-Côte-D'azur. Elles vont causer des désagréments sur l'infrastructure similaires aux autres espèces locales. Mais avec un cycle de vie caractérisé par une très forte croissance (jusqu'à deux mètres en trois semaines pour la Renouée du Japon) et une propagation importante, les conséquences s'en retrouvent multipliées.
Le programme REEVES est un projet en conformité avec les engagements sociétaux de l'entreprise. Retrouvez ici le rapport RSE.
Protocoles expérimentaux sur les talus ferroviaires
Gestion des espèces exotiques envahissantes par la végétalisation du talus et la restauration d'une concurrence végétale sur les ressources naturelles.
Le programme REEVES a pour vocation d’identifier une ou plusieurs techniques permettant la gestion de cinq espèces exotiques envahissantes présentes en Champagne-Ardenne et en PACA.
Cette gestion s’appuie sur le principe d’une restauration végétale associée à une concurrence pour les ressources naturelles du milieu (eau, nutriments, lumière, etc.)
Pour parvenir à un résultat, le travail de restauration commence par la sélection d’une palette végétale arbustive et herbacée avec des critères comme la hauteur et la vitesse de développement, l’adaptation aux conditions pédologiques (pH, sol drainant, etc.) et climatiques (hydrométrie, ensoleillement, températures moyennes, etc.). Cette sélection s’accompagne de caractéristiques supplémentaires liées aux composés allélopathiques et aux symbioses mycorhiziennes (voir définitions ci-dessous).
Deux stratégies de gestion sont évaluées à travers deux protocoles expérimentaux :
- Protocole 1 : dans une stratégie de concurrence vis-à-vis des autres espèces, certaines plantes indigènes libèrent des composés allélopathiques dans le sol. Ces molécules chimiques peuvent avoir des effets (directs ou indirects) négatifs sur les autres végétaux à proximité et les microorganismes du sol. Ce premier protocole permet d’analyser les effets allélopathiques d’une plante indigène sur l’espèce invasive visée pour en limiter la croissance et faciliter l’installation d’une nouvelle strate arbustive qui stimulera davantage la concurrence sur les ressources naturelles. En parallèle, une modalité supplémentaire teste l’inoculation de champignons mycorhiziens lors des travaux de plantation. Cette symbiose facilitera la reprise racinaire, la nutrition et la résistance du végétal.
- Protocole 2 : pour plusieurs plantes invasives, des composés allélopathiques sont libérés en grande quantité via le système racinaire ainsi que les feuilles. Plusieurs publications scientifiques mettent en valeur la capacité des micro-organismes du sol à dégrader ces molécules chimiques. La stratégie du protocole est donc de stimuler la diversité et l'activité microbienne pour favoriser la dégradation des composés allélopathiques, réduire l'influence de la plante invasive et faciliter l'installation de la nouvelle strate arbustive. En parallèle, les champignons mycorhiziens sont inoculés lors des travaux de plantation pour en vérifier l'efficacité dans la nutrition et la résistance des végétaux.
Essais en laboratoire
Le programme REEVES intègre une dimension importante de recherche fondamentale et appliquée grâce au rassemblement d’un consortium de quinze chercheurs. Les objectifs de ce travail en laboratoire sont d’analyser et de comprendre plus finement les mécanismes biologiques à l’œuvre dans le cadre de la restauration végétale (comme l’allélopathie ou les symbioses mycorhiziennes).
Ces études réparties sur les années 2021 et 2023 ont permis à chacun des laboratoires d'aborder et de traiter une question de recherche.
Le premier consortium regroupe plusieurs unités de recherche rattachées à l’Université de Lorraine :
- Le Laboratoire Agronomie et Environnement (LAE)
- Le Laboratoire Sol et Environnement (LSE)
- Le Laboratoire Interdisciplinaire des Environnements Continentaux (LIEC)
Le second consortium se compose d’une équipe de cinq chercheurs de l'Institut Méditerranéen de Biodiversité et d’Ecologie (IMBE) : ils rassemblent plusieurs compétences autour des disciplines de l’écologie végétale et des microorganismes du sol.
Le bilan des travaux en quelques chiffres :
En Champagne-Ardenne :
- 4500 végétaux plantés
- 2200 mètres de tranchées
- 2400 piquets bois (délimitation des quadras de mesure)
Répartis sur 16 stations expérimentales, 192 parcelles de 16m² pour un montant de 238 000€.
Localisation à Deville, Nouzonville et Charleville (département des Ardennes, Ligne 205 000) puis à Germaine et Ay-en-Champagne (département de la Marne, Ligne 074 000).
En PACA :
- 2730 végétaux plantés
- 850 mètres de tranchées
- 780 piquets bois
Répartis sur 11 stations expérimentales pour un montant de 208 000€.
Localisation à Morières-lès-Avignons et Jonquerettes (département du Vaucluse, Ligne 925 000) puis à Agay (département du Var, Ligne 930 000).
Une série de trois forums ont ponctué le projet (2021, 2022 et 2023) pour rassembler le consortium scientifique, les partenaires et les agents SNCF, dans le but de partager l’avancée des études et d’informer sur les résultats.